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Astrolabe-quadrant

  • Titre / dénomination : Astrolabe-quadrant
  • Lieu de production : Maroc, Fès
  • Date / période : 1038
  • Matériaux et techniques : Bois, parchemin, encre
  • Dimensions : Rayon : 12,3 cm
  • Ville de conservation : Fès
  • Lieu de conservation : musée des Arts et Traditions Dâr Batha
  • Numéro d'inventaire : n°38.11-2
  • Inscription :

    cursive sur l’avers:

    عن إذن الأمير حمامة، في 29 ذو القعدة عام 429

  • Traduction :

    « [fait] sur l’ordre du prince Hammâma[1] le 29 dhu al-qi‘da de l’an 429 » (onzième mois de l’année 1038).

Instrument d’origine grecque, l’astrolabe[2] fut adopté et développé dès le VIIIe siècle par les astronomes musulmans qui menèrent de nombreuses recherches dans le domaine de l’astronomie, notamment à travers la traduction d’ouvrages scientifiques indiens, persans et grecs, comme l’Almageste de Ptolémée.

L’astrolabe-quadrant est une variante de l’astrolabe planisphérique, réduit à un quart de cercle grâce à un double rabattement de la projection stéréographique et sans araignée[3]. Ses fonctions restent identiques : instrument de mesure astronomique portatif, il simule le mouvement de la sphère céleste par rapport à la sphère terrestre de référence, afin de résoudre des problèmes d’astronomie sphérique en combinant la géométrie et la trigonométrie : il permet la mesure de l’altitude, des latitudes et longitudes, de la direction de la Mecque, ou de l’heure du jour et de la nuit. Facile à réaliser et peu couteux, l’astrolabe-quadrant est cependant d’un maniement complexe. Chaque instrument n’est valable que pour une seule latitude. Les astrolabes-quadrants furent utilisées dans le monde musulman jusqu’au début du XXe siècle. On en connait des exemples au Maghreb du XVIIIe siècle et dans les Balkans ottomans[4].

Une inscription placée au centre de l’instrument semblerait indiquer un nom de commanditaire et une date de réalisation correspondant au onzième mois de l’année 1038. Contrairement à la majorité des astrolabes-quadrants maghrébins et européens de la période médiévale en laiton gravé, cet instrument a été réalisé sur âme de bois recouverte de parchemin, matériaux dont un nombre d’astrolabes ottomans plus tardifs sont faits[5]. Si l’on ajoute à cela que les premiers astrolabes-quadrants conservés ne remontent qu’au XIIe siècle, et que les premiers témoignages écrits sur cet instrument datent du XIIIe siècle, il est probable que cet objet soit un faux historique, c’est-à-dire que la date inscrite sur l’avers ne corresponde pas à celle de la réalisation effective de l’objet.

Les astrolabes ne présentent en général que peu d’ornements ; cependant le matériau de celui-ci a permit à son auteur d’agrémenter l’instrument de motifs que l’on rencontre en grand nombre sur des supports de céramique, de stuc, et bien sûr de papier ou de parchemin : une frise de rinceaux et de palmettes bifides réalisés à l’encre noire. Ces motifs sont proches stylistiquement de certains décors que l’on peut observer sur des pièces produites en Syrie ayyubide (1169-1260), comme par exemple sur la coupe à décor végétal du musée du Louvre[6].

Les divisions de l’instrument sont placées en retrait du bandeau ornemental, dans une zone dépourvue de décor et composée de trois bandeaux gradués : le premier indique 90°, le second est gradué de 10° en 10°, et le dernier de 15° en 15°. Afin de déterminer les différentes graduations, l’intérieur de l’instrument est muni de plusieurs rayons tracés à l’encre noire, qui ont en partie disparus.

Cet instrument témoigne des nombreux passages qui s’opérèrent via l’Espagne entre les deux rives de la Méditerranée. Al-Andalus connut un important rayonnement culturel, enrichi notamment par la présence de savants juifs et la proximité géographique avec le monde chrétien. En témoignent les écrits de Prophatius Judaeus[7], célèbre astronome et mathématicien juif né à Marseille, qui est, semble-t-il, le premier à décrire l’astrolabe-quadrant qu’il nomme roba‘ Yisrael ou quadrans novus afin de le distinguer des quadrants antérieurs ; ses écrits furent mentionnés par Dante Alighieri[8] dans sa Divine Comédie. Ce témoignage du savant judéo-provençal à longtemps laissé supposer, à tort, que cet instrument était en réalité originaire d’Europe médiévale et qu’il aurait été transmis au monde arabe, où le premier traité conservé décrivant son utilisation remonte au XIVe siècle[9], peu de temps après celui de Prophatius.

NOTE

[1] Émir des Maghraoua (tribu Berbère) qui gouvernait Fès à cette époque.

[2] Le terme vient du grec astron et labê et signifie « qui prend les astres ».

[3] L’araignée est une partie de l’astrolabe, faite d’une plaque ajourée réticulée, que l’on déplace autour d’un pivot à l’aide d’une poignée. Elle représente la voûte des étoiles fixes, qui tournent autour du tympan représentant la terre immobile.

[4] Quadrant signé Muhammad ibn ‘Alî Mursîl al-Andalûsî, Maroc (Wazzân), XVIIIe siècle, M.A/A.O,  n°MN.AM 1963.6.2 ½.

[5] Quadrant tardif réalisé en Turquie vers 1820, Paris, Institut du monde arabe, Al 04-07.

[6] Coupe MAO 112, au décor peint en bleu et noir sous glaçure transparente incolore, produite en Syrie à la fin du XIIe ou au début du XIIIe siècle.

[7] Jacob ibn Machir ibn Tibbon, 1236-1312.

[8] Poète, écrivain et homme politique florentin (1265-1321).

[9] Les jardins fleuris sur l’utilisation de l’astrolabe-quadrant (al-Rawdât al-muzhira fî al-‘amal bi-rub‘ al-muqantarât), par Ahmad al-Mizzî en 1349.

BIBLIOGRAPHIE DE L'OBJET

Amahan, A., « L’astrolabe», in Maroc, les trésors du royaume, (cat. exp., Paris, musée du Petit Palais, 1999) Paris : Paris-Musées, 1999, p. 134, n° 191.

De l’empire romain aux villes impériales : 6000 ans d’art au Maroc, (cat. exp., Paris, musée du Petit Palais, 1990), Paris : Paris-Musées, 1990, p. 230-231, n° 469.

BIBLIOGRAHIE DE REFERENCE

Amahan, A., « L’astrolabe», in Maroc, les trésors du royaume, (cat. exp., Paris, musée du Petit Palais, 1999) Paris : Paris-Musées, 1999, p. 134-137.

Maddison, F., « Observatoires portatifs : les instruments arabes à usage pratique », in Histoire des sciences arabes, vol.1, Astronomie, théorique et appliquée, Paris : Seuil, 1997, p. 139-172.

Saliba, G., « L’astronomie arabe », in L’âge d’or des sciences arabes, (cat. exp., Paris, Institut du monde arabe, 2005 − 2006), Paris : Actes Sud/Institut du monde arabe, 2006, p. 53-67.

Savoie, D., « Les astrolabes», in L’âge d’or des sciences arabes, (cat. exp., Paris, Institut du monde arabe, 2005 − 2006), Paris : Actes Sud/Institut du monde arabe, 2006, p. 92-111.

« Tibbon, Jacob ben Machir ibn [known as Prophatius] (1236–1312) » in Encyclopedia of Astronomy and Astrophysics [en ligne]. Disponible sur <http://eaa.crcpress.com/default.asp? action=summary&articleId=4056> (consulté le 04/02/08).



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