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Crosse en ivoire

Serpent et lion attaquant un bouquetin

  • Titre / dénomination : Crosse en ivoire
  • Lieu de production : Ateliers royaux de Palerme ?
  • Date / période : Deuxième moitié du XIIe siècle
  • Matériaux et techniques : Ivoire
  • Dimensions : H. 19,5cm ; diamètre de la volute 12cm
  • Ville de conservation : Vannes (Morbihan)
  • Lieu de conservation : Trésor de la cathédrale Saint-Pierre

La crosse en ivoire du trésor de la cathédrale Saint-Pierre de Vannes n’est pas entièrement conservée : subsistent la volute, le pommeau et le commencement du bâton. Le pommeau est aplati. Cinq filets décorent la douille. La volute se termine par une tête de serpent et renferme la représentation en ronde bosse d’un fauve attaquant une gazelle.

Cette crosse présente certains caractères des ivoires musulmans, notamment dans la thématique même de l’iconographie. Le combat d’animaux est un thème aux racines très anciennes dans les pays conquis par les musulmans, tant byzantin que sassanide. Au Ve siècle avant J.-C., il figurait déjà sur les murs de l’escalier de l’apadâna à Persépolis, où un lion attaque un taureau. L’art islamique se situe dans la filiation de ces cultures et adopte le thème d’un lion assaillant une gazelle, dès la dynastie des Omeyyades, sur une mosaïque de pavement de la salle des bains du château de Khirbat al-Mafjar par exemple. Dès lors l’affrontement entre un félin et un capridé sera maintes fois réitéré, tant sur des reliefs architecturaux que sur les ivoires, métaux, tissus ou céramiques. Dans le monde islamique, l’affrontement d’un félin contre un bovidé, un capridé ou un cervidé est une affirmation de domination politique. Toutefois les combats d’animaux peuvent aussi avoir une dimension cosmique et symboliser le combat entre les diverses constellations, entre la Lumière et les Ténèbres.

Le travail islamique est associé ici à un objet chrétien, une crosse épiscopale. On a alors déduit que l’origine de cet objet se situait dans la Sicile normande de la seconde moitié du XIIe siècle. Les ateliers royaux de Palerme employaient des artistes orientaux qui travaillaient à des objets luxueux (orfèvrerie, tissus, ivoires, intailles…) destinés à l’éclat de la cour normande[1]. De nombreux coffrets et pyxides sortent des mains d’artisans islamiques. On peut leur associer certains peignes et des crosses d’évêques, bien que l’origine sicilienne de ces dernières ne soit pas toujours admise. Le thème de la crosse de Vannes, tout comme celui de la gazelle et du faucon que l’on trouve sur d’autres exemplaires, est à comparer aux motifs qui parsèment le plafond de la Chapelle Palatine. Ce somptueux plafond de bois en stalactites ou muqarnas est entièrement peint de scènes de buveurs, de musiciens, de danseurs mais aussi d’une série d’animaux réels et fantastiques opposés ou luttant. On retrouve ainsi des lions attaquant des oiseaux, un serpent, une gazelle. De même, les tissus issus des ateliers de la cour siculo-normande et retrouvés dans les tombes royales de Palerme mettent en scène une iconographie similaire. La crosse de Vannes conserve des traces de dorure et de décor peint, qui établissent un lien supplémentaire avec Palerme. Des coffrets d’ivoire, que l’on tient pour siciliens, développent en effet un décor peint ou dessiné à la plume, comme par exemple le grand coffret conservé dans le Trésor de la Chapelle Palatine[2].

NOTE

[1] Voir le catalogue de l’exposition qui s’est tenue à Vienne et Palerme : Nobiles Officinae. Die königlichen Hofwerkstätten zu Palermo zur Zeit der Normannen und Staufer im 12. und 13. Jahrhundert, W. Seipel éd., Vienne-Palerme, 2004.

[2] Federico e la Sicilia, della terra alla corona, vol. II, arti figurative e arti suntuarie, catalogue d’exposition, M. Andaloro éd., Palerme, 1995, n°36.

BIBLIOGRAHIE DE REFERENCE

COTT P.B., Siculo-Arabic Ivories, Princeton, 1939.

GABORIT-CHOPIN D., Ivoires du Moyen Age, Fribourg, 1978, p. 125.

LE MENE I., « Volute de crosse en ivoire conservée dans la cathédrale de Vannes », in Bulletin de la Société polymathique du Morbihan, 1879, p. 218-219.

Nobiles Officinae. Die königlichen Hofwerkstätten zu Palermo zur Zeit der Normannen und Staufer im 12. und 13. Jahrhundert, catalogue d'exposition, W. Seipel éd., Vienne-Palerme, 2004.

Les Trésors des églises de France, catalogue d’exposition, Musée des Arts décoratifs, Paris, 1965, n°337.



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