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Coupe lustrée à décor de Pardalot

  • Titre / dénomination : Coupe lustrée à décor de Pardalot
  • Lieu de production : Valence, Espagne
  • Date / période : XVIIe siècle
  • Matériaux et techniques : Pâte argileuse ; décor de lustre sur glaçure stannifère
  • Dimensions : D. ouv. : 39 cm ; D. base : 11,1 cm ; H. 10,9 cm
  • Ville de conservation : Alger
  • Lieu de conservation : Musée national des Antiquités et des Arts islamiques
  • Numéro d'inventaire : II.C.511

Cette grande coupe de forme carénée présente un décor lustré de couleur rouge cuivré, qui meuble l’ensemble de sa surface y compris le marli, souligné d’un petit feston. Au centre se développe un grand oiseau stylisé aux ailes et à la queue prolongées de plumes filiformes, dit pardalot. Sa tête est tournée vers l’arrière, alors que ses longues pâtes souples se déploient à l’opposé. Tout autour, trois plants d’œillets rappellent par le travail de leurs feuilles les plumes de l’oiseau. Le fond est ponctué de fleurettes. La lèvre lustrée est soulignée de plusieurs filets.

Ce type de céramique appartient à la production valencienne tardive liée à l’art mudéjar, dont le terme vient de l’arabe mudajan[1], qui donna par altération en espagnol mudéjar. Cette appellation est attribuée aux musulmans d’Espagne devenus sujets des royaumes chrétiens après la Reconquête, pendant la période de tolérance. Après la capitulation de Tolède en 1085 et la prise de Saragosse en 1118, les royaumes chrétiens du Nord de la Péninsule ibérique connurent des difficultés pour repeupler les vastes territoires nouvellement conquis. Ils autorisèrent la population musulmane à rester sous domination chrétienne dans les territoires récupérés tout en conservant leur religion, leur langue et une organisation juridique propre. Les chrétiens éprouvèrent une certaine fascination devant les monuments et les objets d’arts islamiques des villes conquises. Ces circonstances sociales favorisèrent la naissance de l'art mudéjar, que l'on peut définir comme le résultat de la rencontre de deux traditions artistiques, islamique et chrétienne.

Le lustre métallique appliqué à la céramique est une technique typiquement islamique originaire d’Irak. Elle se développe en Espagne dans le Sud d’al-Andalus à partir du XIIe siècle et plus tard dans le Nord et le Nord-Est de la Péninsule ibérique, où il se maintient jusqu'à nos jour. Les historiens arabes relatent la fabrication et l’exportation de cette vaisselle. L’emploi du lustre métallique a constitué très tôt l’une des spécialités des ateliers de Valence. Al-Idrîsî[2] (1100 – v. 1165) rapporte que la qal‘a d’Ayyûb (Calatayud), qui faisait partie de la province de Valence, produisait de la céramique lustrée qu’elle exportait. Dès la fin du XIIIe siècle et jusqu’au XVIIe, les potiers Valenciens ont développé leur propre production en introduisant des oxydes métalliques plus rouges et plus cuivrés, une glaçure plus jaune pour le fonds et des variantes dans le décor, qui évolue vers des thèmes plus naturalistes. Le lustre rouge cuivré se rencontre aussi dans la céramique lustrée hafside de Bejaia (Bougie, en Algérie) qui fabriquait des pièces dont certaines étaient exportées vers l’Europe. Il existe un texte mentionnant l’inventaire de la pharmacie de Gènes datant de 1312, où sont citées les belles faïences dorées de Bejaia[3].

Cette coupe appartient à la série pardalot dont le prototype trouve probablement son origine dans le décor persan au motif d’aigle. Ce dernier, aux ailes largement éployées, est souvent représenté au revers des plats de la région de Valence. À partir de la première moitié du XVe siècle, la stylisation s’est accentuée, devenant courante dans les produits de Valence du XVIIIe siècle. La présence de la fleur d’œillet dénote une influence turque, parvenu en Occident par l'intermédiaire des tissus et de la céramique. Les Turcs nommaient cette fleur karanfil, on ignore son origine exacte, peut-être l’Iran ou la Chine.

NOTE

[1] Adjectif tiré du verbe dajana signifiant « s’installer quelque part ».

[2] Célèbre géographe arabe, auteur du Kitâb nuzhat al-mushtâq fî khtirâq alâfâq (Livre du Diverstissement de celui qui désire parcourir le monde).

[3] De Mas Latrie, 1866.

BIBLIOGRAHIE DE REFERENCE

Chalmeta, P., « Mudéjar » in Encyclopédie de l’Islam, nouvelle édition, t.VII, Leyde, Paris, E. J. Brill, Maisonneuve & Larose, 1993, p. 288-291.

 

De Mas Latrie, M. L., Traités de paix et du commerce et documents divers concernant les relations des chrétiens avec les arabes de l’Afrique septentrionale au Moyen Âge, Paris, 1866.

 

Art mudéjar : l’esthétique islamique dans l’art chrétien, Aix-en-Provence : Édisud, 2000.



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